A kin(d)g of magic ! (I)

Première acquisition de l’année pour la Rencontre des Joueurs : King Of New-York, la ‘suite’ du King Of Tokyo de Richard Garfield, le papa de Magic, sorti pour Essen 2014. L’ironie de l’opération c’est que le jeu a été obtenu en échange d’un gros paquet de cartes Magic 😀 Un très grand merci au passage pour le magasin Jeux & Stratégie qui a fait preuve d’une générosité certaine, parce que les cartes en question ne valaient guère plus que leur poids en carton.

Ces derniers temps Concordia a pas mal tourné et autant le jeu m’avait peu convaincu lors de la partie test à deux joueurs, laissant néanmoins entrevoir une mécanique prometteuse, autant à quatre ou cinq joueurs il est particulièrement plaisant à jouer. De fait il renoue avec la veine des très bons jeux de gestion / développement à l’allemande de la fin des années 90 mais avec des mécanismes au goût du jour. Un titre sobre et élégant, classique sans être rétrograde, qui mérite sans aucun doute sa nomination au Spiel. Room 25 est également régulièrement sorti, permettant de combler les temps morts avec son format court et des règles immédiates. Dont une partie totalement improbable qui aura eu le mérite de bien faire rire les joueurs (enfin rire jaune en ce qui concerne Aurélien 😉 ).

Je passe sur mon expérience de Fallen City Of Karez, un jeu malheureusement symptomatique du risque inhérent aux projets kickstartés : un financement trop important par rapport à l’objectif initial qui conduit à multiplier les paliers et un auteur dépassé, incapable de porter le projet à terme. Malgré de très bonnes idées (en particulier le système de combat est ingénieux et mériterait vraiment d’être réutilisé) l’absence d’éditeur amène des règles bâclées et un manque de tri dans la mécanique de jeu, véritable auberge espagnole avec des choses intéressantes et d’autres ratées. L’idée de base avait pourtant de quoi séduire : rebâtir une cité (pour la partie développement / placement d’ouvriers), utiliser ses ressources pour recruter et équiper ses héros et la défendre contre diverses menaces (pour la partie dungeon crawling). Une sorte de Lords Of Waterdeep où les quêtes sont résolues à coups de dés et d’objets magiques.

La suite de. Le jeu reprend exactement la base de son aîné (une énième déclinaison de yahtzee mais sûrement l’une des meilleures, particulièrement efficace et amusante à jouer) en partant d’un constat imparable : les faces 1, 2 et 3 des dés offraient un faible rendement ludique. Qu’à cela ne tienne : dorénavant les voilà remplacées par les résultats ‘célébrité’, ‘destruction’ et ‘ouch !’. En fait célébrité remplace à lui tout seul les 1, 2 et 3 : trois résultats célébrité et le monstre devient la superstar du moment ! Tant qu’un monstre est la superstar il gagne un point de victoire par résultat célébrité. Le plateau est mainteant décliné en quartiers (dont le Queens pour compléter la référence à tiroir du titre de cet article) ; les monstres se trouvent donc sur le plateau, changent – s’ils le souhaitent – de quartier à la fin de chaque tour (avec deux monstres au maximum dans un même quartier) et peuvent y détruire des bâtiments grâce au résultat destruction. L’intérêt de détruire des bâtiments c’est de bénéficier de bonus (énergie, cœurs ou points de victoire) mais en contrepartie des armées apparaissent – qui peuvent également être détruites grâce au résultat destruction. Le résultat ouch ! active les armées. Un ouch ! et les armées présentes dans son quartier tirent sur le monstre qui a obtenu le résultat. Deux ouch ! et les armées présentes dans le quartier du monstre qui a obtenu le résultat tirent sur tous les monstres qui s’y trouvent. Trois ouch ! et toutes les armées en jeu tirent sur les monstres présents dans le même quartier. Mécanisme emprunté à l’excellent Roll Through The Age, l’autre meilleure déclinaison du yahtzee. Ce nouveau système rend le jeu tout à la fois plus subtil et plus violent. A mon goût c’est une jolie amélioration. Avis après trois parties à 4, 5 et 6 joueurs.

King_Of_NY

C’était l’un des gros jeux annoncés d’Essen 2014. Maintenant que j’ai pu m’y frotter je comprends pourquoi et, en même temps, je dois m’avouer un peu déçu. Déçu parce que sous son apparence de jeu améritrash (des figurines, un plateau hexagonal, un univers fantastique, des peuples vaguement asymétriques, des affrontements directs entre joueurs)  le jeu est totalement abstrait et peu immersif, c’en est presque repoussant ; c’est du kubenbois pur jus, en plus interactif quand même, avec un système qui évoque la créature de Frankenstein. Néanmoins pour hétéroclite et peu spontané que soit cet assemblage ludique il faut reconnaître qu’il fonctionne plutôt bien d’un point de vue technique. On y trouve une idée centrale plutôt originale et le système est complet et fluide, offrant des possibilités de jeu variées. Cette idée centrale parlons-en : un joueur pioche à chaque tour trois cubes de couleur (7 couleurs / 1 par catégorie d’actions et 1 couleur ‘déchet’) dans son sac propre, qu’il dépense pour déclencher des actions (celles-ci consomment généralement de 2 à 3 cubes avec -au minimum- une couleur imposée qui dépend de leur catégorie). Il est possible d’acquérir de nouvelles actions spécifiques (mais cela génère en contrepartie un cube déchet qui est inutilisable : c’est une pioche morte), de créer des armées et avec celles-ci d’explorer le plateau et d’en exploiter les ressources (présentes sous forme de cités), de combattre les autres joueurs et les autochtones et enfin d’alimenter son sac avec de nouveaux cubes de la couleur de son choix (ce qui va permettre d’influer -un peu- sur son style de jeu et d’optimiser ses actions à la marge). Dans cette liste on trouve pêle-mêle cinq des catégories d’actions existantes, la sixième étant la génération de points de victoire. Quand un joueur n’a plus de cubes dans son sac il reprend tous ses cubes mobilisés sur des actions pour réapprovisionner son sac et réactive ses armées qui étaient dans une cité (prendre la ressource d’une cité immobilise une armée). Evidemment il existe ouatmille manières de scorer. A défaut d’avoir une âme c’est au moins efficace – ce qui me fait penser à Bora Bora dans un autre genre. Il s’agit d’une impression après une partie inachevée à quatre joueurs.

Hyperborea

  • Dominant Species

Contrairement aux titres précédents il ne s’agit pas vraiment d’une nouveauté ; le jeu est sorti en 2010 chez GMT Games et a déjà bénéficié de trois rééditions. Néanmoins il n’est sorti en français que cette année, chez Filosofia (avec un matériel basé sur celui de la 3ème édition, nettement plus chouette que le matériel d’origine). Dominant Species pourrait être la ‘suite’ de Triassic Terror, l’évolution des espèces au sein des niches libérées par la disparition des dinosaures. Mais autant Triassic Terror peut être décrit comme un El Grande allégé, autant Dominant Species serait plutôt El Grande enrichi ; ça envoie du lourd et -GMT oblige- les parties sont longues (environ 3 ou 4 heures mais on ne s’ennuie pas) et le système parfaitement réglé, tout en laissant le thème s’exprimer. Chad Jensen est vraiment un auteur brillant. Il s’agit donc d’un jeu de majorités territoriales mais ici la programmation des actions est complexe du fait des interdépendances et de leur ordre de résolution, la géométrie du plateau évolue dans le temps (les éléments de survie des espèces changent -voire disparaissent- et les espèces peuvent s’adapter) et les moyens de parvenir à un objectif donné et de scorer sont nombreux. Cerise sur le gâteau le décompte de majorité sur une tuile se fait sur deux dimensions : la majorité à proprement parler mais aussi l’espèce présente la mieux ‘adaptée’ à son environnement. Le joueur qui dispose du plus d’espèces score tandis que le joueur qui dispose de l’espèce la mieux adaptée bénéficie d’une carte action. Personnellement j’ai du mal à intégrer autant de paramètres mais cela ne m’empêche pas de trouver ce jeu formidable. Testé après une partie à cinq joueurs (sur le jeu d’origine) et une partie complète à quatre joueurs (sur la version Filosofia).

Dominant_Species

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2 réponses à A kin(d)g of magic ! (I)

  1. Nnay dit :

    Pour avoir calculer une fois, les cartes pouvaient se revendre pour au moins 150€ à la côte en prenant le temps de le faire.

    • lardj dit :

      Pour avoir largement pratiqué le jeu et vendu pas mal de cartes je ne crois pas non. En fait je ne pense pas que ces cartes aient jamais valu 150€ au plus haut de leur cote mais à la cote actuelle c’est encore pire – des cartes sorties des principaux formats construits et sans intérêt en Modern / Eternal et composées à 99% de communes. Après avoir procédé à une évaluation sérieuse des cartes via la référence MagicCardMarket je pense qu’il était possible d’en tirer au (grand) maximum 15€ – et à condition de trouver acquéreur, ce qui aurait été de toute manière probablement impossible compte tenu de la contrainte des frais d’expédition. Quand je dis évaluation sérieuse je parle du prix réel auquel il est possible de vendre, pas des prix standards affichés par les sites marchands pour des cartes que personne ne cherche. J’ai vendu le gros de ma collection il y a un an donc je pense connaître à peu près la réalité du marché.

      Et si à une époque – à mon avis fantasmée – ces cartes ont pu valoir 150€ et bien il fallait les vendre à ce moment là, avant leur sortie du format Standard…

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